Déployer l’effort de sélection, un objectif phare pour 2025
- Céline Jurik
- 1 août
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 août
Céline Jurik, membre de la commission d’élevage SAR. Publié dans la revue SAR d’avril 2025.
Chaque moniteur-éleveur ou monitrice-éleveuse élève une ou plusieurs lignées. Il ou elle (la forme masculine sera adoptée pour la suite du texte) en a la responsabilité. C’est-à-dire qu’il doit veiller à ce qu’elle ne s’éteigne pas. Chaque saison, il élève des filles sur ses souches pour garantir la survie de sa lignée, de génération en génération.
La population Carnica SAR est composée d’un réseau de lignées qui ont évolué
indépendamment les unes des autres, sous l’œil attentif de leur moniteur-éleveur,
pendant plusieurs années ou décennies. Ce cheminement passe par des fécondations
en station afin de maintenir les caractéristiques souhaitées. Un jour vient le temps de passer la main et de transmettre ce patrimoine à la génération suivante, ou bien de créer une nouvelle ramification avec l’implication d’une nouvelle recrue.

Les éleveurs souhaitent naturellement aller plus loin que cette mission de conservation
qui leur a été confiée. Ils ont à cœur de transmettre une lignée qui a une valeur apicole plus élevée que celle qu’ils ont reçue. C’est le principe de la sélection pratiquée dans l’élevage.
Mais comment faire ? C’est simple : choisir la meilleure et la multiplier. Oui, mais laquelle
est-ce, la meilleure ? C’est une question très complexe en apiculture.
On doit déjà savoir sur quel critère. Est-ce que c’est celle qui fait le plus de miel ? La plus
sympa ? La plus résistante aux maladies ? Chacun peut avoir un point de vue spécifique
sur le sujet. Cependant, les moniteurs éleveurs sont réunis au sein d’un groupement et partagent les mêmes objectifs. Les critères de sélection sont définis à l’échelle du groupe
et leur importance relative également. Ils incluent notamment un index varroa qui nécessite des comptages et des tests techniques.

Ensuite, il faut réussir à distinguer ce qui résulte de la génétique de ce qui résulte de
l’environnement. Etes-vous bien sûr que la performance remarquable que vous observez
est due à l’ascendance de votre reine ? Ne peut-on pas imaginer d’autres explications ?
On peut suggérer :
- Un emplacement dans le rucher offrant par exemple une plus large exposition au
soleil ou une meilleure protection au vent.
- La dérive
- Une colonie plus forte dès sa constitution.
- Un élevage de reine dans de meilleures conditions et une fécondation de meilleure
qualité.
Pour limiter l’effet de l’environnement et des pratiques de l’apiculteur, des mesures sont
à prendre. Elles impliquent un nombre élevé de colonies comparées, et une standardisation du matériel et des protocoles.

Enfin il faut maîtriser la part de la fécondation, et pour cela, on a besoin
d’informations.C’est Beebreed qui les fournit. C’est dans cet outil que nous allons chercher les valeurs qui vont nous servir à faire des choix. Beebreed est un programme informatique de gestion des données
intégrant un outil statistique qui permet de relier les génitrices au sein d’une population et de répercuter les performances des individus apparentés sous forme de valeurs de sélection. Il permet également de calculer le coefficient de consanguinité et d’estimer les valeurs de sélection de la descendance
planifiée. Cet outil, bien que complexe, permet de situer le patrimoine génétique d’une reine au sein de la population de référence.
Les performances de toutes les colonies apparentées influencent la valeur attribuée par Beebreed à une colonie. Ainsi, si de nombreuses représentantes d’une série de reines proches génétiquement ont fait l’objet de relevés de performances particulièrement
bons, une reine apparentée va être pourvue d’une valeur d’élevage elle aussi élevée, et
inversement. On a ainsi accès à des informations sur la valeur d’élevage de reines qui n’ont pas été évaluées sur le critère observé ou qui ont été évaluées dans un
environnement défavorable à l’expression du caractère.
Prenons l’exemple d’une mauvaise année ne permettant pas aux colonies testées
d’exprimer clairement ni leur potentiel d’efficacité à la prospection et au butinage, ni leur propension à essaimer. Si des reines apparentées ont pu manifester ces caractéristiques dans d’autres tests déployés la même année dans une autre zone géographique ou au cours d’une année précédente, l’indication sera intégrée au calcul de la valeur d’élevage de la reine non évaluée. L’existence dans le système de données concernant les reines apparentées est une condition à l’obtention de valeurs fiables.

Récapitulons, il nous faut :
- une population présentant une large diversité génétique,
- des objectifs clairs et partagés,
- un nombre important de colonies,
- le contrôle des fécondations,
- une standardisation des méthodes et du matériel,
- beaucoup de relevés de données sur le comportement des colonies,
- et un outil informatique puissant.
Pas si simple, finalement.
Pour accompagner les éleveurs dans leur effort de sélection, et les aider à accroître la collecte des données, améliorer leur normalisation et leur qualité, un nouveau
guide a été édité. Il est disponible et consultable par tous sur le site de la SAR à cet emplacement :

Vous pouvez être testeur même si vous n’êtes pas moniteur-éleveur. Si vous avez une vingtaine de colonies ou plus, de l’expérience, le goût d’explorer davantage cette discipline et de participer à l’effort collectif, vous
pouvez vous former et contribuer. Consultez le guide et contactez-moi par mail si vous souhaitez être informé des formations à venir.
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